Wednesday 18 February 2015

Grand Témoin : Pierre Vaquier


Knight Frank : Le groupe AXA a une double casquette en immobilier d’entreprise puisqu’il est à la fois investisseur et utilisateur. Votre avis est donc particulièrement intéressant. Voyez-vous le rebond actuel de la consommation de bureaux se poursuivre ou s’agit-il, selon vous, d’un simple phénomène de rattrapage ?
Pierre Vaquier : Le rebond qui a été constaté au 1er semestre, principalement alimenté par de grandes transactions, qui avaient fait défaut en 2013, ne s'est pas poursuivi par la suite et nous sommes assez circonspects pour l'année 2015, dans un contexte économique sans croissance qui ne crée pas d'emplois, et dans lequel les entreprises limitent leurs investissements et privilégient la renégociation des conditions contractuelles sur leurs locaux. Malgré les efforts des investisseurs pour optimiser les actifs de bureaux que ce soit en neuf ou dans le cadre de rénovations ambitieuses, tant dans l'amélioration des espaces que dans la définition d'offres de services innovantes, il est à craindre que les chiffres de prises à bail ne progressent pas en 2015. Heureusement, à l’exception de certains secteurs, les taux de vacance restent assez stables et le marché francilien démontre encore une fois une forte résilience. Toutefois, l'offre de locaux de qualité est souvent limitée et ne permet pas de répondre aux demandes des utilisateurs, ce qui nous amène à penser qu’un rebond des commercialisations consécutif à une quelconque amélioration de la situation des entreprises pourrait conduire à une situation de pénurie, notamment dans le Quartier Central des Affaires.

KF : AXA IM vient de confirmer sa présence, historiquement ancienne, sur le quartier de La Défense. Pourquoi ce choix de rester à La Défense et pourquoi maintenant ?
P. V. : Le bail d’AXA IM à Cœur Défense arrivant à échéance en juin 2016, c’est dans ce contexte que nous nous sommes posés la question de notre implantation à La Défense. Le choix de rester sur La Défense a été guidé par plusieurs considérations. D'une part, c'est le plus grand quartier d'affaires d'Europe et il offre une visibilité exceptionnelle à notre entreprise qui y est installée depuis 2001, d'autre part, il est possible d'y trouver une offre répondant à nos besoins de surfaces et de très grande qualité. Les études que nous avons menées en interne ont également démontré que cette localisation convenait bien à une majorité de nos collaborateurs tout en permettant d’accueillir nos clients dans d’excellentes conditions. La modernisation du réseau de transports, le plan de renouveau de La Défense et les conditions de marché favorables pour les utilisateurs nous ont permis de nous projeter à moyen terme sur cette localisation.

KF : En faisant le choix de la tour Majunga, AXA IM s’est positionné sur un immeuble phare et novateur. Quels sont les principaux enjeux de l’entreprise dans ce projet de déménagement ?
P. V. : La tour Majunga est en effet une tour de nouvelle génération et ses prestations innovantes et de haut niveau contribueront à renforcer l’attractivité de notre société et à développer les échanges entre équipes. Ce changement de locaux à venir s’inscrit dans l’ambition d’AXA IM de renforcer son attractivité et de devenir une des meilleures entreprises du secteur en matière de bien-être au travail pour ses collaborateurs. En amont de notre réflexion immobilière, un consultant externe reconnu a été missionné afin d’évaluer les besoins d’AXA IM en termes d’espaces et de modes de travail. Cette étude, qui a impliqué 760 collaborateurs d’AXA IM (120 personnes en groupes de travail et entretiens individuels et 640 personnes via un questionnaire en ligne), a permis de définir les premiers éléments de réflexion sur la mise en place d’un environnement de travail adapté aux besoins des collaborateurs et de nos clients et qui soit en ligne avec les meilleures pratiques du marché.


"La modernisation du réseau de transports, le plan de renouveau de La Défense et les conditions de marché favorables (...) nous ont permis de nous projeter à moyen terme sur cette localisation."

KF : Nous allons vous demander de remettre votre casquette d’investisseur. La situation économique française n’est pas flamboyante, même si la région parisienne tire nettement mieux son épingle du jeu, quelles sont les contraintes et les exigences des utilisateurs dans ce contexte et comment les avez-vous vues évoluer au cours des dernières années ?
P. V. : Les utilisateurs retardent aujourd’hui les prises de décision immobilières, et recherchent plus que jamais des économies budgétaires ou la rationalisation de leurs espaces de travail. À défaut de véritable amélioration du contexte économique, les utilisateurs resteront très prudents en ce qui concerne leurs stratégies immobilières conduisant les propriétaires à consentir des avantages commerciaux élevés pour maintenir leurs locataires ou attirer des prospects vers leurs surfaces vacantes. À noter toutefois que l’obsolescence d’une partie du parc de bureaux et la prise en compte des nouveaux modes de travail devraient conduire à une mobilité de certains utilisateurs ce qui pourrait animer le marché et favoriser les immeubles neufs bien conçus, ou parfaitement rénovés, offrant les meilleurs standards environnementaux et de confort.
Par ailleurs, s’agissant de la Loi dite « Pinel », alors que le régime existant des baux commerciaux était déjà très protecteur pour le locataire, et générait un volume très élevé de contentieux sans que cela favorise la compétitivité des entreprises ; cette loi instaure un déséquilibre entre la protection des droits du locataire et celle des droits du propriétaire et introduit davantage d’insécurité juridique pour le bailleur. Il y a un paradoxe à annoncer une volonté de simplification et de compétitivité pour les acteurs économiques et à produire des textes législatifs complexes et ayant pour conséquence de modifier les équilibres du marché de l’immobilier.

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